Gérer son patrimoine
       


L'investissement, le ratio financier universel


1- Qu'est ce qu'un investissement ?

Au final, tout ne se résume t-il pas à l'association d'un gain et d'un coût ?

On pourrait schématiser l'investissement, comme la mise en place consciente d'un coût immédiat et certain (probabilité de 100%) dont l'objectif est d'engendrer un gain potentiel futur mais incertain plus élevé que ce coût ou bien à l'inverse, comme l'engendrement d'un gain immédiat et certain (probabilité de 100%) dont l'objectif est de payer un coût potentiel futur mais incertain moins élevé. Parfois, le coût et le gain seront tous les deux certains (probabilité de 100%) ou tous les deux incertains.

Dans les deux cas, il s'agit d'un pari sur l'avenir où l'investisseur estime que le coût est inférieur au gain. Le gain pouvant être un gain d'argent ou de temps, une protection contre un risque... et le coût pouvant être une perte d'argent ou de temps, une prise de risque...

Couples Gain/Coût possibles :

Coût Gain Exemples
Dépenser de l'argent Gagner du temps *Achat d'un logiciel de gestion du temps             *Emploi de personnel
ou externalisation
Dépenser du temps Gagner de l'argent *Travail
Prendre un risque Gagner de l'argent *Investissement en bourse *Ouverture d'entreprise
Dépenser de l'argent Se protéger d'un risque *Assurances               *Garde du corps                *Travaux de mise aux normes de sécurité

2- Le ratio Gain potentiel/Coût potentiel (Ratio GP/CP) ou le ratio financier universel :

Le monde de la finance utilise beaucoup les ratios tels que :

- Le ratio rendement/risque (allocation d'actifs).
- Le ratio rendement économique/coût de l'emprunt (effet de levier).
- Le rapport qualité/prix.

Nous pouvons tous les regrouper en un seul ratio universel Gain potentiel/Coût potentiel où l'on considère que tout est soit un gain soit un coût.

Lorsque vous utilisez le ratio rendement/risque dans le cadre de l'allocation d'actifs, le coût est la prise de risque et le gain est la plus-value, le dividende ou le coupon. Concernant l'effet de levier, le coût est le coût total du crédit (intérêts et capital emprunté) et le gain est la rentabilité économique (% plus-value et % rendement locatif) que procure le bien acquis à crédit.
Dans notre article sur la rentabilité des travaux utilisant le ratio Impact sur la valorisation/Coût des travaux, le gain est la prise de valeur du bien (% plus-value) et le coût est le prix des travaux. Dans le rapport qualité/prix, le coût est le prix et le gain est la qualité du produit. Dans le milieu médical, on utilise également le ratio bénéfice/risque.

3-  Estimation des gains et des coûts en fonction de leur nature :

Dans le ratio GP/CP, vous comparez des gains et des coûts pouvant être de nature différente (risque, temps, argent...). L'estimation doit donc être déterminée de manière différente.

a-  Les gains et coûts financiers :

- Le gain financier = rentabilité  en %, en plus-values réalisées, en chiffre d'affaires...

- Le coût financier = coût de revient (total des frais d'acquisition).

b-  Les gains et coûts en matière de risque : estimation par la quantification

- Le gain en matière de risque = limitation du risque (gestion des risques), indemnisation et couverture d'un risque (assurances)...

- Le coût en matière de risque = prise de risque financier, juridique...

* Attention : le risque est une donnée plus difficile à calculer qu'une rentabilité ou un temps. Vous devez utiliser la quantification du risque :
- Quantification du risque = Probabilité d'occurrence X Degré de dangerosité (Q = PO X DD).
Pour une gestion de portefeuille, on utilise plutôt l'écart type pour estimer la volatilité.

Vous pouvez ainsi évaluer l'importance du risque gagné (Gain) ou pris (Coût) en fonction de sa probabilité et du danger encouru ou de sa volatilité.

c-  Les gains et coûts en matière de temps :

- Le gain de temps = heures, jours, mois, années gagnés...

- Le coût de temps = heures, jours, mois, années dépensés...

4- Espérance et intégration des probabilités : gains et coûts effectifs ou potentiels

Si les gains et/ou les coûts sont effectifs (déjà réalisés) ou si ils sont absolument certains, il faut appliquer une probabilité de 100%.

Si les gains et/ou les coûts sont potentiels (pas encore réalisés) et incertains, il faut calculer l'espérance de gains ou de coûts.
Autrement dit, il s'agit de faire la moyenne des gains et/ou des coûts avec comme pondération leur probabilité.

Dans la plupart des cas, le ratio GP/CP intégrera à la fois des données effectives et des données potentielles.

5-
 Marge de sécurité : minimiser le gain futur et maximiser le coût futur

Etant donné que l'investisseur fait son choix en comparant des données certaines (gain ou coût immédiat) avec des données incertaines (gain ou coût futur), la marge d'erreur peut être importante. En effet, si l'investisseur peut estimer au moment d'investir le coût ou le gain de départ, il ne peut pas en revanche estimer avec certitude le gain ou le coût potentiel. Il doit donc prendre une marge de sécurité. Pour cela, il faut dans un premier temps estimer au plus juste le coût ou le gain de départ, puis minimiser le gain futur ou maximiser le coût futur. 

6- Bon ou mauvais investissement ? Utiliser le ratio financier universel G/C :
Formule :

G : valeur du Gain 
C : valeur du Coût
P(G) : probabilité de G
P(C) : probabilité de C
GP : espérance de G
CP : espérance de C

Ratio GP/CP =

[G1*P(G1)+G2*P(G2)+...Gn*P(Gn)] / [C1*P(C1)+C2*P(C2)+...Cn*P(Cn)]


Ratio GP/CP > 1 : bon investissement.
Ratio GP/CP < 1 : mauvais investissement ou dépense.
Exemples d'investissements :

Cas 1 (chiffré) :  assurance multi-risques habitation.

Coût : cotisations d'assurance.
Gain : indemnisations en cas de sinistres habitation ou de responsabilité civile.

Une responsabilité civile ou une habitation non-assurées peuvent vous coûter des sommes astronomiques en cas de sinistres. Même si les cas peuvent être rares, les cotisations d'une assurance multi-risques habitation sont relativement basses par rapport au degré de couverture de ce type d'assurance.

G1 = 1, 000, 000 (indemnisation responsabilité civile)
G2 = 0 (pas d'indemnisation)
C1 = €200 (cotisation annuelle)
P(G1) = 0,1%
P(G2) = 99,9%
P(C1) = 100%

Ratio GP/CP =

[G1*P(G1) + G2*P(G2)] / 
[C1*P(C1)] = [1, 000, 000*0,1% + 0*99,9%] / [200*100%] = 1000 / 200 = 5

Ratio GP/CP > 1.

Il s'agit d'un bon investissement.

Cas 2 (chiffré) :  effet de levier sur bien immobilier locatif

Vous décidez d'emprunter à taux fixe de 3% un montant de 80, 000 avec un apport personnel de 20, 000 pour un bien d'un montant de 100, 000. Vous souhaitez ensuite le louer avec un rendement annuel de 5% net. Vous pensez également que les prix peuvent monter plus ou moins par la suite.

G1 = 5% (taux de rendement locatif annuel si loyers payés)
G2 = 0% (taux de rendement locatif annuel si loyers impayés)
G3 = 10% (taux de plus-values attendu)
G4 = -5% (taux de plus values attendu)
C1 = 3% (taux d'intérêt de l'emprunt)
P(G1) = 80% (loyers payés)
P(G2) = 20% (loyers impayés)
P(G3) = 30% (10% de plus -values annuelles)
P(G4) = 70% (-5% de moins-values annuelles)
P(C1) = 100%

(5%*80%+0%*20%+10%*30%-5%*70%) / (3%*100%) = 0,58333333333333...

Ratio GP/CP < 1.

Il s'agit d'un mauvais investissement.


Cas 3 :  investissement en bourse.

Coût : immobilisation du capital investi.
Gain : dividendes et plus-values.

Vous achetez des titres dans le but que le cours monte ultérieurement. Si c'est le cas, vous réalisez un bon investissement, si le cours baisse et qu'il ne remonte jamais ou après une période beaucoup trop longue (immobilisation du capital trop longue), l'investissement est mauvais.

Ratio GP/CP > 1 : plus-values et dividendes.
Ratio GP/CP < 1 : moins-values et absence de dividendes.

Cas 4 :  recrutement de personnel d'entreprise.

Coût : coût salarial et perte de temps (formation du personnel)
Gain : gain de temps, puis d'argent.

Vous décidez d'employer du personnel pour produire plus rapidement et vous octroyer plus de temps pour d'autres missions plus rentables. Le coût salarial et le temps de formation du personnel doivent en principe vous faire ensuite gagner plus de temps pour ensuite vous faire gagner plus d'argent. Votre chiffre d'affaires et vos bénéfices doivent donc croître plus vite que le coût salarial pour que votre investissement soit bon. Dans le cas contraire, vous n'auriez pas dû recruter.
 
Conseil :

Un bon investisseur doit donc déceler les coûts les plus bas ayant un potentiel futur de gains le plus élevé possible ou déceler les gains les plus élevés ayant un potentiel futur de coûts le plus faible possible.

Evitez donc de surpayer vos investissements (surplus d'argent, de temps, de prise de risque...).

- Voir notre article : Eviter les bulles spéculatives

Ce qui aurait pour conséquence de démarrer un investissement avec un coût de départ handicapant et réduisant d'autant le potentiel de gains futurs. En effet, plus le coût de départ sera élevé (argent, temps, prise de risque...), plus la marge de manoeuvre sera réduite et plus l'investissement risque d'être mauvais.

Vous devez également savoir attendre lorsque vous ne voyez pas de bons investissements à l'horizon. Investir à tout prix est la pire des solutions, préférez investir à bas coûts !

*
Attention : cette stratégie ne fonctionne que dans un environnement où les fondamentaux de l'investissement sont bons. En effet, si les fondamentaux de base sont mauvais, le coût n'a aucune importance, l'investissement doit être absolument à éviter !

- Voir notre article : Etapes de validation d'un investissement

Lorsque vous investissez, évitez de vous baser sur un scénario trop optimiste, visant à surestimer la valeur et la probabilité des gains potentiels ou à sous-estimer la valeur et la probabilité des coûts potentiels. Estimez le plus correctement possible les coûts et les gains de départ puis minimisez les gains potentiels et maximisez les coûts potentiels.  Cette marge de sécurité vous permettra de compenser les erreurs d'estimation tant sur les valeurs espérées que sur les probabilités attendues.